HER : un au revoir suspendu au temps

Juste cinq minutes, à demi-mots, sur le bout des lèvres. Des spectateurs figés à l’annonce de la fin d’une des plus belles histoires d’amour. Non pas charnelle, mais fraternelle. Celle immortelle que rien n’use ni ne brise.


Otzeki s’est réalisé de façon mature, sensuelle et onirique. Une entrée en matière digne de ce nom. Une bouchée d’un met fin, qui apaise votre avidité, en même temps qu’elle crépite au contact de votre palais. Enfin, dans un élan de grâce, Mike Sharp noue sa chemise et dévoile un déhanché frénétique. Ce saltimbanque, comme convulsé, se plie, se tord, se démembre, à l’aide de mouvements audacieux mais justes. Sur scène, une guitare bleue glacier et blanc, posée là, rappelle une de ces glaces en été. En parlant de food, pour la petite anecdote, le catering nous a confié que Joel et Mike ont mangé de l’houmous accompagné de carottes et de concombres. Et beaucoup de fromage français à leur demande. Ces deux personnages intrigants nous titillent, comme au début d’une relation naissante, pour finalement s’éclipser furtivement. On attend impatiemment l’éclosion potentiel de cet amour.

Otzeki, c’est un équilibre puissant entre une voix perçante et un accompagnement au synthé transcendant. Mike a l’allure travaillée, le crâne rasé et arbore une chemise oversize et un pantalon rouille. Sa chemise entrouverte laisse entrevoir une clavicule saillante. Un “bonsoir” glissé avec un accent si sexy. Et puis, cette interaction loufoque avec le public qui met en pause le spectacle; “ça va très bien et toi?” prononce suavement le chanteur en réponse à un homme. 

Tous âges confondus, les rennais se sont déplacés pour vivre une prestation inhabituelle.  C’est sans prétention que la bande d’Her surgit de l’ombre du Liberté. Ils n’y croyaient pas. “J’ai l’habitude de l’UBU” nous avoue un Victor d’humeur taquine. Mais, “quel plaisir de rentrer à la maison !”, poursuit-il. En effet, Rennes a couvé Her avec The Popopopops, groupe de rock introductif à ce roman fantastique. Et aujourd’hui était la dernière page d’un roman passionnel et passionnant. Puisque promesse tenue, Victor confie vouloir commencer une nouvelle page d’un nouveau chapitre. Pouvoir avancer. C’est ainsi qu’il nous dévoile le squelette de sa dernière chanson. Dress code bordeaux, Her nous a ainsi livré un spectacle poignant. Les mots manquent pour décrire cette expérience qui s’inscrit au-delà d’une dimension a priori lyrique. Au loin, on discerne un micro posé sur scène, vide. Simon laisse l’écho d’une chambre vide, la mélancolie des jours heureux. Mais aussi l’espoir, l’amour.

A propos d’amour, Victor a signé une très jolie interprétation d’“Union”, qu’il a dédicacé à sa femme Mathilde; “Un titre qui parle d’amour, d’engagement”. Hypnotique, Her nous a aussi fait vibrer avec “A change is gonna come”, un titre blues maîtrisé à la perfection. La complicité entre musiciens et ce brûlant hommage nous ont arrachés des larmes qu’elles soient intérieures ou extérieures.
Ce concert a permis à Victor de délivrer un message fort. Un de ceux qui résonnent dans les cœurs de chacun. “C’est toujours possible, même quand vous pensez qu’il n’y a plus d’espoir, nagez à contre courant.”

Le cœur serré de les quitter en ce cinq octobre. Devoir les laisser partir dans le prochain wagon. Avec l’espoir d’un nouvelle aventure pleine d’émotions.

Written By: Jade Ropers

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