À l’affiche : Hors saison, de Stéphane Brizé

ENFIN ! C’est le printemps. En attendant que le soleil s’installe véritablement en Bretagne, quoi de mieux que la salle de ciné pour sortir de ce tunnel hivernal ?


Que se passe-t-il lorsqu’on stoppe le mouvement ? Est-ce que le mouvement ne nous empêche pas de voir les choses en face ? En plein confinement, le réalisateur Stéphane Brizé qu’on connaît particulièrement pour son cinéma engagé autour de la thématique du travail, est taraudé par l’effet de la fixation du temps dans notre monde où tout va si vite. De cette première idée jaillit une douce histoire d’amour, idéale pour ce début de saison printanière…

Mathieu (Guillaume Canet), comédien de renommée, pars en Bretagne pour un séjour thalasso après avoir abandonné un projet théâtral qui l’impressionnait trop. En pleine crise, il enchaîne massages, repos et exercices sportifs pour pallier à son angoisse et sa culpabilité. C’est alors qu’il reçoit un message de son ex Alice, une professeure de piano, perdue de vue depuis quinze ans. Ils décident de se revoir, de résoudre les conséquences de leur séparation, pour peut-être renouer…

Hors Saison porte parfaitement bien son titre. Le film nous plonge dans un espace à contre-temps du flux permanent : une station balnéaire en période creuse, encore immaculée de ses touristes. Le temps infuse sa douceur d’une scène à l’autre et nous fait goûter au présent de l’instant. Un temps parfois long où les séquences tirent sur le fil des conservations. Mais c’est dans ce souci de ne pas aller directement à l’essentiel que se traduit la vérité des sentiments : malgré quinze années de séparation, l’émotion des retrouvailles bout sous la chair des anciens amants, et Mathieu et Alice, d’abord maladroits comme des adolescents, parviennent à retrouver la magie de leur réunion.

Entre eux, il y a « ce qu’on montre et ce qu’on cache » (pour paraphraser le coach sportif ésotérique de la séquence d’introduction du film). On montre que les vies vont de bon train, qu’on a une jolie famille, qu’on est heureux devant les caméras ou derrière notre piano, qu’en somme, la vie a fait son cours comme elle était supposée le faire… Mais derrière ces tableaux parfaits, se cachent d’autres aveux : la lâcheté d’un comédien, la désillusion d’une femme qui croit tout avoir, et de part et d’autre, le besoin de se heurter à autre chose. Se heurter ! Cela tombe bien, ils se sont retrouvés, et cette rencontre fortuite vient précisément les bousculer dans leur quotidien respectif. Le passé, pris dans le remous des pensées, vient questionner et repenser leur relation…

Sans les invoquer explicitement, Stéphane Brizé se rapproche d’autres cinéastes de référence. Nous pensons aux amants impossibles de Un homme, une femme de Claude Lelouch, pris dans la tempête venteuse d’une plage en Normandie, à l’intime complicité de la rencontre dans Lost in translation de Coppola, et -presque- au cinéma ironique du multi-primé Ruben Ostlund, dans la façon qu’a Stéphane Brizé de dépeindre l’absurdité du thalasso.

Hors Saison est une jolie partition romantique. Quoi que trop long parfois, le film parvient à nous embarquer dans la fraîcheur et la fébrilité des retrouvailles entre deux personnes qui s’aiment. Alba Rohrwacher, partenaire de Guillaume Canet sur le film, crève de sincérité à l’écran, et à elle-seule, vous donne une raison supplémentaire d’aller découvrir le film au cinéma. C’est au cinéma Arvor, et c’est à 5 euros jusqu’à mardi !

Written By: Lorène Hivet