La resectorisation des collèges : un projet qui inquiète

Le conseil départemental a pour souhait d’améliorer la qualité et le confort de l’enseignement pour les élèves et les équipes pédagogiques. Pour ce faire, ils ont opté pour la resectorisation des collèges.

Il faut réaménager les collèges

L’évolution démographique de la population bretillienne ces 15 dernières années ( +17 %) a également créé une augmentation des effectifs des collégiens (+10 %). C’est pourquoi le département a voté un plan d’accueil pour ces derniers sur la période 2015-2025.

L’objectif est d’optimiser la capacité d’accueil des collèges publics, en créant 3 000 nouvelles places sur Rennes et sa couronne. Par conséquent, des solutions ont été apportées en fonction de la situation. Il y a, bien entendu, l’adaptation de la carte scolaire, la mise en place de travaux pour restructurer les collèges ou les agrandir et enfin la fermeture d’un collège pour en ouvrir trois autres.

Un déséquilibre de zones

Le département maintient une évolution d’environ 10 000 habitants par an depuis 2013 ; notamment grâce à un flux migratoire important. Cela compense la baisse de natalité : 11 500 naissances en 2020 contre 13 000 en 2011. Certaines zones sont en expansion, telle que les communes du bassin rennais, le littoral malouin et son arrière-pays ainsi que les communes situées le long des axes majeurs de circulation.

Quant à d’autres zones, elles stagnent, voire même déclinent, à l’instar des zones éloignées des principaux pôles urbains et les villes aux frontières départementales.

La resectorisitaion permettrait d’équilibrer les deux zones, comme ce fut le cas avec le collège de Bréal-sur-Monfort qui a vu l’arrivée de collégiens de Mordelles et de Bruz notamment.

Sur les 24 822 collégiens du pays de Rennes, 42 % sont scolarisés dans le centre-ville de Rennes, soit 10 350 élèves.

Collège de la Binquinais

Les pour et contre de la resectorisation

La resectorisitaion des collégiens permet une plus grande mixité sociale. Véritable atout social pour les élèves et le corps enseignant, selon Etienne Butzbach, coordinateur du réseau mixités à l’école du centre national d’études des systèmes scolaires : « Cet impératif de mixité, qui figure dans la loi de refondation de l’école de 2013, est pour moi constituant du service public de l’éducation.»

Toutefois, ce projet s’accompagne de conditions pour réussir. L’affectation d’élèves dans divers collèges ne suffit pas à créer une mixité utile à tous. Dans un premier temps, il faut accompagner les équipes pédagogiques afin qu’ils gèrent au mieux la mixité dans le temps scolaire et périscolaire.

Il est important aussi de proposer une meilleure qualité de l’offre éducative. Enfin, il faut avant tout l’adhésion des familles.

Ce qu’en pensent les parents

Du point de vue des parents, ce n’est pas le nombre d’élèves par classe qui compte, mais la réputation de l’établissement, nous assure Mélanie, parent de Noa en 5e : « C’est égoïste, mais la mixité sociale on s’en fout, tu veux que ton enfant aille dans une bonne école ». De plus, la resectorisation peut être contraignante pour les parents et les collégiens. En fonction de l’emplacement de l’établissement, la durée du trajet pourra être plus longue. Ce qui signifie de plus grosses journées pour les adolescents. Quant aux parents, ils ont également « des contraintes professionnelles et économiques et la distance revient à cher ».

Ce qu’en pense le corps enseignant

Dans les faits, la mixité sociale ne fonctionne pas, nous explique Philippe Melaine, membre du secrétariat départemental du SNES (Syndicat National de l’Enseignement secondaire): « C’est une catastrophe », «  ils ont ouvert un secteur multicollèges mais se sont les familles les plus pauvres qui y vont ».

De plus, les collèges privés ne sont pas soumis à la carte scolaire. Les parents souhaitant envoyer leurs enfants dans le privé peuvent le faire sans demander de dérogation. Il n’y a donc pas de mixité sociale.

Autre problème : le nombre d’élèves par classe. Au collège Emile Zola, ils sont 30 par classe, pénalisant ainsi l’apprentissage des élèves en difficultés.

Au collège des hautes Ourmes, au Blosne, il y a un manque du personnel de la vie scolaire pour les 700 élèves de l’établissement. Normalement, au-delà de 600 élèves, il doit y avoir 2 CPE, ce n’est pas le cas.

Sans oublier que 8 000 postes d’enseignants ont été supprimés alors qu’il y a 40 000 nouveaux élèves.

Rappelons qu’en décembre 2021, 75 Millions d’euros destinés à l’éducation nationale ont été supprimés et qu’en quarante ans, c’est pas moins de 17 061 écoles qui ont été fermées.

Il faut tenir compte également de l’accès au CAPES. Cette année, sur les 1035 postes de mathématiques ouverts, seuls 816 candidats ont été admis. De même pour les professeurs d’allemand, seulement 83 admis pour 215 postes.

Il y a donc un manque cruel de professeurs dans nos établissements.

Ce qu’en pense le département

Pour Jeanne Larue, vice-présidente déléguée à l’éducation au département, le constat est sans appel. La première resectorisaton mise en place en 2015 a montré des failles qu’il faut corriger, notamment au collège Rosa Parks. Il est donc nécessaire de relancer une concertation. C’est dans cet objectif qu’une nouvelle étude est lancée et ce pendant 18 mois. Tous les acteurs de l’éducation, les parents et des instances politiques, seront sollicitées pour mettre en place des solutions durables et efficaces pour l’avenir de nos enfants. « On a besoin de cette alliance éducative »,  « Pour moi, c’est le sujet majeur auquel il faut s’attaquer ». Bien que les effets de cette nouvelle resectorisation ne seront visibles qu’ à partir de la rentrée scolaire de 2024, pour Jeanne Larue, il est urgent « de promouvoir l’égalité scolaire », qui est le socle de notre pacte républicain.

Written By: Clémence Le Denmat